Jamais le thème de la souveraineté européenne n’a autant été d’actualité. Il y a deux ans, nous publiions en octobre 2023 une lettre sur ce thème, avec la conviction que la construction d’une forme de souveraineté sur le vieux continent serait créatrice de valeur économique. Force est de constater que cette tendance s'accélère significativement depuis quelques semaines.
La construction européenne a souvent progressé dans des phases de crise. Cet épisode ne déroge pas à la règle. Contrairement à certaines thèses soulignant la faiblesse du vieux continent, nous continuons à voir dans l’Europe une opportunité d’investissement très prometteuse.
D’abord parce que les orientations prises par l’Allemagne1, que personne n’attendait aussi vite, changent la donne en termes de capacité de relance budgétaire, de déblocage de financements au niveau des instances européennes, et d’ancrage du pays au sein d’une véritable stratégie de souveraineté européenne.
Ensuite parce que cette crise des relations transatlantiques intervient au moment où le système bancaire européen termine son assainissement. Les institutions financières du sud de l’Europe sont aujourd’hui beaucoup plus fortes que dans les décennies passées2, en témoignent les capitalisations boursières des groupes bancaires espagnols et italiens3. Le système bancaire européen apparaît donc sain, les asset managers européens sont ancrés dans leur géographie et les investisseurs européens semblent vouloir renforcer leur contribution au financement de cette souveraineté.
Enfin, parce ce que la vitesse à laquelle se sont mobilisés les acteurs du secteur public et privé pour redéfinir les priorités industrielles, les moyens de les financer, et collaborer ensemble pour rattraper le retard technologique et financier pris sur les Etats-Unis nous encourage non seulement à apporter notre contribution à cet effort dans le partenariat public-privé, mais aussi à investir significativement dans les opportunités créées par ces choix stratégiques, que cela soit dans la transition énergétique, le financement des entreprises de taille moyenne, la cyber sécurité, la défense, le financement des infrastructures stratégiques comme les centres de données, l’agriculture régénératrice ou les actifs réels.
C’est pourquoi nous décidons de ressortir cette lettre en l’état, afin de donner à nos lecteurs l’opportunité de se réimprégner des idées qui nous ont conduit il y a plusieurs années à privilégier les investissements dans la construction de résilience et de souveraineté en Europe que cela soit en private equity, en dette privée, en investissement en actions cotées et obligations corporate, ou en actifs réels. Cette tendance s’accélère si l’on en croit l’intérêt porté par des investisseurs non-européens pour cet espace économique.
Nous restons persuadés qu’investir en Europe de manière sélective et en respectant l’ancrage local pour accompagner les besoins massifs en dépenses d’investissement, la renaissance des politiques industrielles et le développement des champions européens dans leur construction de résilience sera un vecteur considérable de création de valeur financière et extra-financière dans les prochaines décennies.
1 https://www.lemonde.fr/international/article/2025/03/18/en-allemagne-les-deputes-adoptent-le-plan-d-investissements-historique-pour-rearmer-le-pays_6583317_3210.html.
2 Source : publication des résultats des banques, données au 31/03/2025.
3 Source : Bloomberg, données au 24/04/2025.
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Publication
CIO Letter - Europe, The Final Countdown : réflexion sur les enjeux de souveraineté européenne